Salut les TPTistes !
On se retrouve aujourd’hui pour un épisode hors-série autour du Québec (et pas Canada, attention). Votre newsletter préférée Temps pour Temps vous a concocté recettes, astuces et anecdotes autour de cette gastronomie aux accents si particuliers. Au menu de ce 3 novembre 2024 :
La suggestion : TPT vous embarque à plus de 5.000 km de la France, au Québec. Découvrez une gastronomie façonnée par les peuples qui s’y sont établis à travers le temps.
Sous la toque : On vous raconte l’histoire de la poutine, et on vous file les bonnes adresses…
Dernier verre : Le cidre de glace, cette version sans bulle et plus liquoreuse du cidre de pommes, fabriquée à l’aide du froid québécois.
La bouchée :La recette du saumon rôti au sirop d’érable, vous allez tomber en amour avec cette recette comme disent les Québécois·es.
Au coeur du pistil : Johanne, notre journaliste agricole, nous décrypte comment on passe de l’érable au sirop doré qui coule sur nos pancakes.
Culture popote : Retour en 1930, aux origines du pouding chômeur.
Le caton : Le meilleur Kouign-Amann serait québécois ?!

La suggestion de la semaine 🍽️
La gastronomie québécoise est un condensé de l’histoire de la région. On y retrouve bien-sûr l’influence des colon·es français·es, venu·es s’installer dans cette région d’Amérique du Nord au début du XVIIe siècle. Iels importent la culture du blé, du sarrasin et l’élevage du porc, et reproduisent leurs spécialités culinaires à base de charcuterie, de viandes en sauce ou de desserts à la pomme.
Sur place, les colon·es récupèrent les techniques agricoles des autochtones. Iels découvrent le sirop d’érable (nous y reviendront plus tard), mais aussi le maïs (qu’on appelle toujours aujourd’hui «blé d’Inde»), que les peuples natifs cultivent avec la courge et les haricots. Trois plantes qui s’aident mutuellement à grandir, si bien qu’on les nomme «les 3 sœurs». Une technique pertinente dans un pays où les longs hivers empêchent la production de fruits et de légumes.
Pour se nourrir, les Québécois·es sont donc obligés de se fournir à l’étranger. Mais les produits animaux et végétaux importés coûtent chers, et ne sont pas accessibles à tous·tes. Dans les étals des supermarchés, on retrouve alors de nombreux produits transformés, plus abordables, comme aux États-Unis, même si les Québécois·es sont très chauvin·es et mettent en avant leurs productions. En automne par exemple, les pommes prennent toute la place dans les rayons.
Dans ce numéro, vous allez découvrir l’histoire des certaines spécialités à boire ou à manger, du sirop d’érable au cidre de glace, en commençant par la poutine…
Sous la toque 👨🍳👩🍳
Des frites, du fromage en grains et de la sauce brune. Trois ingrédients, pour l’un des plats les plus iconiques du Québec : la poutine. Là-bas, on en trouve partout et à toutes les sauces. Mais les meilleures sont servies dans les cantines au bord de la route dans les zones plus rurales du Québec. C’est là que la poutine est née, dans les années 50-60.
Plus précisément dans le Centre-du-Québec, où plusieurs restaurants se disputent son invention. Le premier: Le Lutin qui rit à Warwick. Selon la légende, en 1957, un client aurait demandé au propriétaire de mettre le fromage et les frites dans le même sac, ce qui a donné le mélange de base. C’est exactement le même cas de figure dans un autre établissement,La Petite Vache, fondé en 1966, à Princeville, qui pense aussi être l’inventeur de ce 50-50.

Mais dans tout ça, quid de la fameuse sauce brune ? C’est au restaurantLe Roy Jucep, situé à Drummondville, que la poutine comme on la connaît aurait fait son apparition. En 1964, Jean-Paul Roy, le propriétaire, aurait pris l’habitude de servir le fromage et les frites avec de la sauce sur demande d’un client. Selon une théorie très répandue, ce client, que l’on retrouve partout, pourrait bien être la même personne. Un commercial qui faisait le tour de la région.
Pour le nom aussi les versions sont nombreuses. La poutine était d’abord connue sous le nom «mixte». Selon la version la plus répandue, son nom viendrait du mot «pouding», dérivé de l’anglais pudding, qui désigne un mélange collant de plusieurs ingrédients.

Lire tout ça vous a donné faim ? Embarquez avec nous direction la campagne québécoise pour découvrir les bonnes adresses de poutines (et Dieu sait qu’on en a testé beaucoup…). Il en existe plusieurs sortes, avec des aliments en plus, comme de la viande fumée, du bacon, des petits pois, de la sauce bolognaise, etc. Nous, on est restés assez sobres.
La meilleure que nous ayons goûtée se trouve à LaCantine de Sainte-Flavie, située dans la ville du même nom. Une classique, mais le fromage était vraiment délicieux. Mention spéciale aussi pour celle au bacon fumé du Casse-croûte la molière. Cette fois, c’est la sauce brune qui était délicieuse. Et pour les plus citadin·es d’entre vous, on vous conseille la poutine de la chaîne Ashton à Québec !
Dernier verre


Faute de pouvoir établir des cultures à cause du froid, les Québécois·es ont su tirer avantages de ce climat unique dans leur gastronomie. Iels ont par exemple inventé le cidre de glace, fait à partir de pommes, rares fruits qui poussent dans le pays. Il s’agit d’une boisson alcoolisée dont la fermentation s’effectue par l’action du froid naturel.
C’est Christian Barthomeuf, un viticulteur français venu s’installer au Québec dans les années 70, qui a inventé cette boisson. Il s’est inspiré du vin de glace. Pour faire du cidre de glace, il existe plusieurs méthodes. L’une d’entre elles consiste à laisser les pommes mûres sur les arbres pendant l’hiver (il faut une race de pomme qui ne tombe pas). Elles vont fermenter et se concentrer en sucre avant d’être récoltées et pressées.
Ça donne un cidre liquoreux, orange, sans effervescence, plus concentré en goût et fort en alcool (entre 10 et 13 degrés). Il est particulièrement apprécié à l’apéritif pendant les fêtes. Certains grands producteurs québécois exportent leurs produits à travers le monde si vous voulez goûter cette drôle de boisson. On en trouve aussi dans quelques vergers normands (avec du froid artificiel) comme au Pressoir d’Or.
La bouchée 👄
Pour cette recette spéciale hors-série, nous avons choisi de vous présenter un plat que nous avons goûté chez une Québécoise, d’après la recette de Josée Di Stasio, célèbre animatrice télé québécoise. Il s’agit de pavés de saumon rôtis au sirop d’érable : deux aliments traditionnels outre-Atlantique. Vous allez voir ça demande un peu de préparation mais c’est délicieux, une recette idéale pour un dimanche midi par exemple.
Ingrédients (pour 4 personnes) :
- pour le saumon : 4 pavés de saumon (170 g.) avec la peau, 2 c. à c. de sel, 2 c. à c. de sucre, 2 c. à s. (ou plus) de sirop d’érable, 2 c. à s. d’huile d’olive.
- pour la sauce verte : 1 morceau de 4 cm de gingembre râpé finement, 5 c. à s. de ciboulette hachée, 1 c. à s. de persil, 1/2 tasse (125 mL) ou plus d’huile d’olive.

1. Commencez par faire mariner le saumon. Dans un plat, mélangez le sel et le sucre. Saupoudrez votre saumon avec ce mélange, couvrez et placez au réfrigérateur pendant 45 minutes.
2. Rincez le saumon et égouttez-le. Réservez à température ambiante pendant 30 minutes.
3. Réalisez la sauce verte pendant ce temps. Rassemblez tous les ingrédients dans un mixeur et mixez jusqu’à obtenir une sauce homogène. Sel, poivre et on réserve !
4. Dans votre four préchauffé à 120°, déposez les pavés de saumon côté peau dans un plat. Arrosez de sirop d’érable et d’huile d’olive, ajoutez du poivre.
5. Au bout de 15 minutes de cuisson, vous pouvez arroser le saumon avec le jus. Quand la peau s’enlève facilement, c’est cuit. Cela prend en général entre 20 et 30 minutes à cuire.
Servez le saumon avec la sauce et régalez-vous comme nous au Québec ! Si vous testez la recette, n’hésitez pas à nous taguer sur notre compte Instagram @temps.pour.temps !
Au cœur du pistil 🔎

Salut c’est Johanne ! Journaliste agricole, je vous emmène dans les champs découvrir la culture des aliments et rencontrer celles et ceux qui les produisent dans « Au cœur du pistil ». Alors à vos bottes !
De l’érable au pancake, le chemin du sirop doré
Des forêts à perte de vue : le paysage emblématique du Canada. Elles couvrent plus d’un tiers du pays. Dans ce pays où l’arbre est sacré, les terres arables (sur lesquelles on peut cultiver des aliments, ndlr) se font plus rares : seulement 4,4% du territoire. Pourtant, les autochtones ont trouvé l’abondance en entaillant l’un de ces nombreux arbres : l’érable. Aujourd’hui, le Québec est le berceau de la culture de cet or brun, (73% de la production mondiale en 2022).
Si l’hiver rude empêche les autres cultures de pousser, ici, «l’eau d’érable» coule à foison. La saison des sucres commence à l’aube du printemps, entre fin février et début mars, et dure jusqu’à fin avril, début mai. Les forêts d’érables se transforment alors en entre-chambre de coffre fort, où les lasers à détection de mouvement sont remplacés par un assemblage de tubes fins, appelés «tubulures».

Un arbre peut être entaillé plusieurs années de suite, à un endroit différent à chaque fois, jusqu’à ce qu’il ne soit plus assez productif. L’eau d’érable encore transparente, atterrit dans d’immenses cuves qui peuvent atteindre jusqu’à 20.000 litres. Elles sont parfois remplies en une seule journée !
Mais comment l’eau se transforme-t-elle en sirop ? (La suite est à lire avec la voix de Jamy Gourmaud) Eh bien après avoir été concentrée, l’eau d’érable est mise dans un évaporateur. L’eau y est chauffée, pour n’y laisser qu’un sirop couleur caramel. Il faudrait entre trois à six litres de concentré d’eau d’érable pour obtenir un seul litre de sirop d’érable.
Et pour qu’il coule parfaitement sur les pancakes, le sirop passe par une dernière filtration avant d’être commercialisé. En 2022, le Québec a produit 95,5 millions kilos de sirop. Alors, ça en fait pour combien de pancakes ?
Culture Popote 🍭
Au restaurant québécois, vous trouverez sans mal le «pouding chômeur» à la carte. Ce dessert au nom pas très appétissant est typiquement québécois et son histoire vaut le détour.
Dans les années 30, le krach boursier de 1929 provoque une grave crise économique au Québec et dans le monde entier. À Montréal, de nombreux ouvriers perdent leur emploi. La pauvreté s’accroît dans les quartiers industriels. Le maire, Camillien Houde, met alors en place de nombreuses réformes pour leur venir en aide.
Et selon la légende, son épouse, Georgianna Falardeau, aurait imaginé la recette du pouding chômeur, pour aider les femmes d’ouvriers à cuisiner un dessert réconfortant à moindre coût. Pour cela, juste de la farine, du beurre, du lait et du sucre brun (qui a ensuite été remplacé par du sirop d’érable). Mais aucun témoignage ou document ne prouve cette théorie. Le pouding chômeur serait plutôt l’invention des femmes d’ouvriers elles-mêmes…

Le Caton 🥚
Le meilleur Kouign-Amann vient de Montréal ?
Le 23 janvier 2023, le New York Timesfrappe les esprits (et l’égo) des Breton·nes, en mettant en Une de son site web le fameux Kouign-Amann, pâtisserie bretonne par excellence, créée dans le Finistère. Dans son article intitulé «Les nombreuses leçons du Kouign-Amann», la journaliste Yewande Komolafe raconte le lien intime qui la lie à ce dessert réconfortant.
Le problème, c’est que selon elle, le meilleur Kouign-Amann se trouve à Montréal. Et non pas en Bretagne (aïe aïe aïe…). Cerise sur le gâteau, le pâtissier qui en est à l’origine est Normand… Ça fait beaucoup là non ?
Le suspect n°1 s’appelle Nicolas Henry. Débarqué au Québec il y a plus de 20 ans, ce pâtissier normand est à la tête d’une boulangerie dans le quartier français du Plateau, à Montréal. Interrogé par Le Télégramme, qui a eu vent en premier de cette histoire, Nicolas Henry a souhaité nuancer les propos de la journaliste : «Le vrai Kouign-Amann n’est pas à Montréal. C’est en Bretagne que ça se passe. C’est là qu’il est né, c’est de la Bretagne que le Kouign-Amann prospère et qu’il traverse l’Atlantique.» Alors, nos abonné·es breton·nes, vous lui pardonnez ?
